1939 : Saint-Gobain dans la Seconde Guerre mondiale

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, de nombreuses usines de Saint-Gobain sont détruites, arrêtées ou mises sous séquestre, les communications sont coupées avec plusieurs d’entre elles, la production est entravée par les pénuries de main-d’œuvre et de matières premières. La situation est rendue plus tragique encore que pendant la Grande Guerre par la défaite de l’armée française en 1940 : privée de ses biens en Allemagne et en Italie, la Compagnie doit faire face aux autorités d’occupation en France où elle se heurte aux problèmes épineux des prisonniers, de la collaboration économique et des persécutions antisémites.

Le déclenchement de l’offensive allemande en mai 1940 jette sur les routes de l’Exode les « Saint-Gobinards » comme des millions de Français. La Compagnie avait envisagé de replier une partie des services du siège parisien et de ses archives au château de Ménars (Loir-et-Cher) qu’elle avait acquis en août 1939. L’invasion allemande et l’Occupation bouleverse ses plans : beaucoup de ses employés mobilisés ont été faits prisonniers, la glacerie de Pise est mise sous séquestre par le régime fasciste puis entièrement détruite par des bombardements alliés en 1944. Les actifs de la Compagnie en Allemagne sont également placés sous séquestre par le régime nazi : si le premier administrateur judiciaire, Werner Kehl, parvient à protéger tant bien que mal les intérêts de Saint-Gobain face au ministère de l’Économie du Reich, ce n’est plus le cas après sa mort en 1943.
C’est dans ces conditions pourtant difficiles que Saint-Gobain amorce un effort de recherche et de modernisation riche de promesses pour l’avenir en s’appuyant sur de petites équipes de chercheurs relativement détachées des préoccupations de la gestion immédiate : en 1941 commencent les premières recherches sur un procédé de fabrication de la laine de verre propre à la Compagnie qui aboutiront quinze ans plus tard avec le TEL ; la même année, la branche chimique de Saint-Gobain se lance dans la production de matières plastiques avec la mise au point d’un ancêtre du PVC, le « Gobanyle » ; en 1942, le Twin-douci, qui améliore sensiblement la finition de la glace, est installé à la glacerie de Chantereine. La production de verre textile se développe à l’usine de Rantigny pour les marchés de l’isolation électrique, des tissus décoratifs et, quelques années plus tard, des matériaux composites. Ces efforts sont entrepris sous l’effet de la nécessité car la guerre a rompu les liens existant avec les firmes verrières américaines et britannique : Eugène Gentil, Directeur Général des Glaceries et cheville ouvrière des échanges technologiques dans l’entre-deux-guerres, est ainsi bloqué aux États-Unis tout au long de la durée du conflit.
La libération des usines à partir de l’automne 1944 puis le retour à la paix permettent de lancer la reconstruction de l’appareil de production, qui s’appuie sur l’indemnisation des dommages de guerre. La création en 1947 de l’usine de matériaux réfractaires du Pontet dans le Sud-Est de la France en est l’un des chantiers les plus emblématiques.